Ecolo a déposé une motion contre un traité de libre échange commercial avec les Etats-
Unis qui risque d’impacter les décisions communales. Elle a été soutenue par la majorité et Ensemble.
Certains auront peut-être été étonnés de trouver à l’ordre du jour du conseil communal de décembre 2014, une motion relative à l’accord « Partenariat transatlantique de commerce et d’investissements entre l’Union européenne et les Etats-Unis (TTIP).
S’il se concrétise, le TTIP, dont les négociations sont d’une opacité à faire frémir, aura un réel impact sur notre quotidien à tous, en tant que citoyens, mais aussi sur la gestion communale.
De façon générale, le TTIP vise la suppression des barrières non-tarifaires, c’est-à-dire des normes (sociales, sanitaires, environnementales, etc.) et l’ouverture des services publics (écoles, logements sociaux, Culture, …) à la concurrence américaine.
Dans son article 27, il prévoit que « l’Accord sera obligatoire pour toutes les institutions ayant un pouvoir de régulation et les autres autorités compétentes des deux parties. » Ceci concerne donc aussi les communes.
Demain, avec le TTIP, non seulement on retrouvera dans nos assiettes du poulet lavé au chlore ou du boeuf piqué aux hormones…mais en plus, si la Commune veut protéger ses citoyens en intégrant des clauses visant à interdire ces produits dans ses cantines ou lors des cérémonies qu’elle organise, elle ne pourra pas le faire.
Je ne parle ici que de l’agro-alimentaire, mais le TTIP s’attaque à tous les secteurs sauf celui de l’audio-visuel, c’est dire l’ampleur de son champ d’application!
Demain, avec le TTIP , il sera en effet risqué, pour une commune, de prendre
certaines décisions comme, par exemple de subsidier l’enseignement ou des
événements culturels, se passer de pesticides dans l’entretien d’espaces verts,
l’interdiction d’OGM dans les repas servis aux écoles ou dans les maisons de repos ou encore de la mise en place de critères pour une alimentation locale et de qualité…
Ces biens et services seront, comme bien d’autres, privatisables. Toute
norme publique locale à leur propos sera considérée comme « obstacle non
tarifaire » à la concurrence et donc soumise à sanction. Certaines décisions
communales « entravant la liberté de commerce » dans le cadre du TTIP pourront donc être considérées comme de la concurrence déloyale. Ce serait à un tribunal arbitral d’en juger. Or, le mode de fonctionnement d’un tribunal arbitral ne correspond pas aux procédures judiciaires que l’on connaît dans nos juridictions : absence de publicité des débats, pas de possibilité de faire intervenir une tierce partie, pas de mécanisme d’appel ni d’indépendance des juges… Si ce tribunal estime que le principe de libre échange tel qu’instauré par le TTIP est bafoué, les sommes à payer pour dédommager l’entreprise lésée seront astronomiques.
Pour toutes ces raisons, Ecolo a déposé la motion ci-dessous qui a été soutenue par l’Union politique et le groupe Ensemble, ce dont nous les remercions.
Proposition de Motion :
– Vu le mandat relatif à la conclusion avec les États-Unis d’un accord appelé «Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement», donné par
le Conseil des ministres européens des affaires étrangères et du commerce le 14 juin 2013 ;
– Considérant que ce partenariat menacerait l’acquis communautaire européen et belge en matière de normes sociales, environnementales, de santé, de protection des services publics et des consommateurs, ou encore de sauvegarde de l’industrie européenne ;
– Considérant que cet accord serait un moyen pour les multinationales d’éliminer les décisions publiques considérées comme des entraves à l’augmentation de leurs parts de marché, et qu’il s’agirait d’une atteinte sans précédent aux principes démocratiques fondamentaux qui ne ferait qu’aggraver la marchandisation du monde, avec ses conséquences en termes de régressions sociales, environnementales et politiques ;
– Considérant que cet accord créerait un mécanisme arbitral de règlements des différends, composé d’experts privés non élus, par lequel les Communes, livrées aux avocats d’affaires, pourraient être directement attaquées par une firme privée. Ce qui signifie que toute espèce de norme – sociale, sanitaire, alimentaire, environnementale ou technique – adoptée par une Commune, dès lors qu’elle contrarie une firme privée, pourrait être attaquée par un arbitrage privé.
– Considérant qu’un tel montage juridique limiterait la capacité des Etats de maintenir des services publics (éducation, santé, etc.), de protéger les droits
sociaux, de garantir la protection sociale, de maintenir des activités associatives, sociales, culturelles préservées du marché (menaçant par là la diversité culturelle et linguistique) ;
– Considérant que le lait, la viande avec usage d’hormones, la volaille à l’eau de Javel et bien d’autres semences OGM commercialisés aux Etats-Unis pourraient arriver sur le marché européen et belge, au dépens de la production locale, des circuits courts et durables ;
– Considérant que ce grand projet de marché transatlantique menacerait la
relocalisation des activités et le soutien au développement de l’emploi, et permettrait de considérer la protection des travailleurs et le modèle social belge comme entraves au marché ;
– Considérant que cet accord imposerait la mise en concurrence (et donc la
privatisation à terme) de la production et de la distribution de toutes les formes d’énergie, et ouvrirait la porte à la contestation de lois limitant ou interdisant l’usage de certaines d’entre elles, ce qui aboutirait à la perte de la maîtrise par les pouvoirs publics de toute politique énergétique ;
Le conseil Communal d’Orp-Jauche
1. Affirme que le projet de traité de Partenariat Transatlantique constitue une
grave menace pour nos démocraties communales, en matière économique, sociale, sanitaire, environnementale, culturelle.
2. Refuse toute tentative d’affaiblir le cadre communal, national ou européen en matière de santé, d’environnement, de protection des travailleurs, des consommateurs et des entreprises ;
3 Demande qu’il soit mis un terme définitif aux négociations du projet de
Partenariat transatlantique sur le Commerce et l’Investissement entre l’Union
européenne et les Etats-Unis d’Amérique.